La
voix des communautés prise en compte dans la sélection des projets
La mise en œuvre du projet Lexforest
s’inscrit dans un processus participatif. Le 2 mai 2024, une réunion organisée
à Mebesso par le CADDE a permis d’identifier les activités susceptibles de
promouvoir le développement des communautés locales à la base. « Il
n’était plus intéressant qu’on conçoive des projets à distance pour les
implémenter auprès des communautés. Nous avons voulu que l’approche soit
participative, inclusive et parte même de la communauté », motive M.
Pamboundem. Il est ressorti que la communauté a un souci de formation dans les
activités qu’elle a préalablement identifié à savoir l’aviculture, la
pisciculture et la formation à la fabrication du savon de manage et des
vêtements.
Plus d’une
douzaine de personnes constituées des membres de la communauté (dont six
femmes) ont pris part aux échanges. « Il est question de passer par des personnes
pour atteindre la communauté. On veut qu’à terme, on arrive à mettre en place
une ferme avicole soutenue par l’action des communautés. Nous voulons que ces
activités durables génératrices de revenus se répandent dans d’autres villages
riverains. Et ceci appelle à lancer un cri d’alerte aux autres partenaires
techniques et financiers et bailleurs qui peuvent mettre à disposition des
financements additionnels pour qu’on structure mieux le projet pour l’étendre à
d’autres communautés. Le financement qui nous est alloué ne peut pas adresser
toutes les activités en vue », soutient le directeur exécutif du
CADDE.
L’adhésion
des populations, facteur de succès du projet Lexforest
La session de formation animée par Mowam
Ousmanou a porté sur plusieurs modules : les paramètres environnementaux
qui intègrent le choix d’un site adapté (disponibilité d’eau, accès au
poulailler, terrain), les bâtiments construits suivant les normes de l’art
(ventilation, rigole, sol…), l’alimentation (besoins alimentaires des poulets
de chair, systèmes de distribution de l’aliment), la santé (respect des mesures
de biosécurité et des programmes de prophylaxie). « A travers cet élevage,
les activités de chasse et de pêche non durables vont diminuer dans la zone.
Pendant qu’ils acquièrent de nouveaux revenus, ils vont abandonner de plus en
plus le braconnage ou la surpêche », précise le formateur, Mowam Ousmanou.
« La plus-value d’une telle formation est que les personnes formées soient
portées en capacités. Des revenus seront générés dans le village. Il y aura un
effet de masse, car les participants à cette formation vont aller dans leurs
familles en former d’autres pour diffuser les modules appris au sein de la
communauté, pour que les gens puissent s’intéresser à l’élevage des poulets de
chair. Il y a des opportunités autour de ces poulets », poursuit notre
interlocuteur.
Les participants ont trouvé de l’intérêt
autour de la formation. « Pendant les fêtes de fin d’année, les gens
quittent du village pour aller acheter les poulets en ville. En cours de route,
certains poulets meurent. S’il y a un tel projet dans le village qui aboutit à
la mise en place d’une ferme, les produits seront disponibles le moment venu et
à moindre coût », confie Chimène France Angue. Même son de cloche pour
Emile Eba’a, notable à la chefferie de troisième degré de Mebesso. « Le
projet est le bienvenu dans notre localité car nos sources de revenus seront
diversifiées pour faire vivre nos familles. La pratique de l’élevage va
permettre de réduire le braconnage et décourager les jeunes qui partent en
brousse. Nous sommes très contents de ce qu’on a appris », manifeste notre
source.
Ismaël Sinclair Ondo va plus loin. En
tant qu’un facilitateur de l’activité, il a relevé que, jusqu’à présent, les
membres de la communauté dépendaient du cacao sur une période de quatre mois au
cours de l’année. Durant les huit autres mois, ils tiraient le diable par la
queue. « Si nos parents, frères et sœurs parviennent déjà à économiser
quelque chose en apprenant, il y aura un impact sur le niveau socio-économique
des populations. Avec une activité parallèle, ça permet d’être toujours en
mouvement durant les huit autres mois et de ne pas dépendre uniquement du cacao
ou de la chasse », ajoute-t-il.
A l’issue de la formation, les intrants
seront mis à la disposition de cette communauté pour que l’activité démarre et
que les poulets de chair soient présents sur les tables de la communauté et
environs. Les intrants remis seront constitués de 200 poussins pour la phase pilote,
de la provende, des vaccins, des antibiotiques et des vitamines pour les
poulets de chair. Pour la pisciculture, ils recevront l’appui en construction d’étangs,
des alevins et de la provende.
Le
sanctuaire à gorilles de Mengame : une zone de clé de biodiversité à
protéger
Le choix porté sur le sanctuaire à
gorilles de Mengame n’est pas anodin. La biodiversité du sanctuaire est
unique en son genre, avec la présence des grands primates de l’Afrique centrale
et de l’Ouest : singes, gorilles, éléphants. « Le projet qui est en
cours d’exécution est une aubaine pour la zone et pour la zone de Mebosso qui
en est bénéficiaire. Si rien n’est fait, on va détruire cette zone de
conservation et perdre ces espèces rares en Afrique », explique Elie Blaise
Pamboundem, celui-là qui est à la tête d’une organisation de la société civile
qui travaille sur les questions de gestion durable des ressources naturelles,
avec pour zones d’intervention les départements de la Mvila et de la Vallée du
Ntem.
Le projet Lexforest est
aussi une manière de préserver la biodiversité du sanctuaire à gorilles de
Mengame, de garder les espèces clés pour que les enfants et petits-enfants des
membres de la communauté puissent aussi les voir et que l’activité puisse
procurer de l’argent à travers l’écotourisme. A l’issue d’une activité tenue à
Sangmelima en septembre 2023, un comité de surveillance du sanctuaire situé
entre les départements de la Mvila (80%) et du Dja-et-Lobo (20%) a été mis sur
pied. Selon les indications de Global Forest Watch, l’aire protégée a fait
l’objet de plus de 1200 alertes consécutives à des actes d’irrégularité
observés à l’intérieur du sanctuaire, entre 2021 et 2022. De sources
concordantes, le sanctuaire à gorilles de Mengame couvre une superficie de
130 000 hectares de part et d’autre de la frontière entre le Cameroun et
le Gabon. La zone abrite quelques 16 espèces de primates, dont le gorille des
plaines occidentales.
Kenfack