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Tag: Changement climatique en Afrique

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Des difficultés d’accès en carburant dans les principales villes du Cameroun relancent le débat de la dépendance aux énergies fossiles sur fond de fin de COP28 à Dubaï…

Par LEONEL AKOSSO 
Cette semaine a démarré sans faire le plein de carburant. Ceci en raison de la difficulté pour les usagers de s’approvisionner dans les stations-service des principales villes du pays. Et à l’observation des tensions économiques et sociales déjà en gestation à la défaveur de cette crise que l’on dit passagère, il est clair que l’abandon du pétrole débattu tout au long de la COP 28 terminée à DUBAÏ le 12 décembre 2023 n’est pas la priorité du citoyen camerounais lambda.
Nous sommes à Ndokoti, un point carrefour de la ville de Douala. Ce 11 décembre 2023, il est 16 heures. La très spacieuse STATION TRADEX qui domine ce secteur est saturée. Une file indienne composée de motos-taximens armés chacun d’un bidon d’eau minérale vide d’une capacité de 10 litres fait la queue pour se faire servir en super. S’ils sont contraints de délaisser ainsi leur mouture, c’est non seulement en raison du rationnement orchestré par les stations-service qui, faute d’avoir été suffisamment approvisionnés, ne distribuent que 02 litres maximum de carburant par client. Les pompistes témoignent que  » les réserves de gazoil sont pratiquement épuisées quoiqu’encore disponibles le matin ». Comme au carrefour Ndokoti, c’est le même scénario qui se joue dans d’autres lieux d’approvisionnement des villes de Douala, Yaoundé, Bafoussam, Ebolowa et ailleurs.
Pourtant, dans un communiqué publié par le Ministre de l’Eau et de l’Energie, Gaston Eloundou ESSOMBA se veut rassurant. Il affirme :  » cette perturbation a pour principale cause le retard dans l’arrivée de trois navires transportant ledit produit, dû aux conditions mété-océaniques défavorables qui ont interrompu les chargements ship-to-ship desdits navires pendant 04 jours au port-hub de Lomé  ».
La communication du Ministère de l’Eau et de l’Energie annonce également que l’un des navires est déjà au quai de Douala avec 13000 m3 de super et qu’un chargement de 81 camions citernes a été engagé sous la coordination de la SCDP ( Société Camerounaise des Dépôts Pétroliers) pour acheminer la cargaison vers l’arrière-pays. Une version officielle contestée par plusieurs commentateurs.
Toujours est-il que les pénuries observées dans la distribution de carburant au Cameroun sont récurrentes dans notre pays, bien que selon les autorités publiques, il n’est pas question de parler de  »pénurie de carburant  » mais plutôt de  »perturbation » dans la distribution. Le constat effectué sur le terrain porte le super en tête des produits pétroliers connaissant un réel déséquilibre de stock dans les stations-service en ce moment.
De quoi perturber également les équilibres économiques et sociaux en cette fin d’année. Pour certains, cette rareté du carburant a été l’occasion de faire de la surenchère : les prix du transport ont subi une hausse spectaculaire dans la ville de Douala. Pour rallier le quartier YASSA au carrefour ANGE RAPHAËL, dans la zone universitaire de Douala, il fallait débourser 1000 FCFA pour s’offrir le luxe d’être  »bâchée » sur une motos-taxi . C’est dire que l’heure est grave…
L’heure est d’autant plus grave que la COP28 s’achève à Dubaï sur une fausse note. Annoncée comme étant la date et le lieu d’un tournant radical des énergies fossiles vers les énergies renouvelables, ce rendez-vous environnemental mondial a plutôt été le théâtre de l’hégémonie du pétrole depuis la désignation d’un patron d’entreprise pétrolière pour présider cette Conférence jusqu’à la pression exercée par le chef de l’OPEP ( Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) sur plusieurs pays producteurs de l’or noir comme l’Arabie Saoudite, l’Iran ou la Koweït en leur intimant l’ordre de ne pas valider toutes résolution impliquant la sortie du pétrole à courto ou à moyen terme. Autant d’annonces qui laissent à penser que malgré les alertes lancées tant par le monde scientifique que par les militants écologistes, l’industrie du pétrole a encore de belles années devant elle.
Et le CAMEROUN devrait en profiter puisqu’il a plus que jamais besoin du pétrole pour approvisionner les moteurs de la prospérité économique de sa jeunesse au chômage. Les crises répétitives de pénurie de carburant doivent nous inciter à prendre exemple sur l’entrepreneur nigérian ALIKO DANGOTE qui vient de doter son pays d’une raffinerie de pétrole. Un tel projet, en plus de créer des emplois au Cameroun, réduirait considérablement notre dépendance vis-à-vis des importations de pétrole raffiné, depuis l’étranger.

Alors qu’elles ont fait de la lutte contre la corruption un de leur cheval de bataille, les autorités militaires parrainent et encouragent le pillage des forêts du Mali où le bois de rose, communément appelé ‘’bois de Vène’’, est coupé massivement et exporté vers la Chine, en passant principalement par le port de Dakar. Ce reportage est réalisé par un consortium de journalistes sénégalais qui a vu le jour après une formation sur le journalisme d’investigation initiée par la Plateforme de protection des lanceurs d’alerte en Afrique. C’est également grâce à l’appui du Rainforest Journalism Fund et du Pulitzer Center que le travail a pu être fait.

BIGUE BOB ET MOR AMAR

Un désastre continu. Contre 25 000 F CFA (environ 45 dollars) offerts à des chefs de village peu soucieux du devenir de leurs communautés, les Chinois arrivent à piller une bonne partie des forêts maliennes, en complicité avec quelques hommes d’affaires véreux et des autorités haut placées. Au plus, leurs intermédiaires déboursent 50 000 F CFA, pour arriver à remplir plusieurs camions. ‘’Cela me fend le cœur. Je ne peux plus me taire’’, fulmine cette source qui a travaillé dans une scierie à Bamako.

Sous le couvert de l’anonymat, le cœur meurtri, notre interlocuteur exprime son amertume : ‘’C’est très écœurant ; je suis sidéré de voir comment le bois de rose est abattu dans nos forêts. Et ils n’épargnent même pas les jeunes individus. Ils abattent tout sur leur passage, avec la complicité de quelques Maliens qui s’enrichissent au détriment de nos populations qui s’enfoncent dans la pauvreté.’’

Malgré les complaintes, malgré le durcissement de la réglementation internationale par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites), le trafic de bois continue de plus belle dans ce pays voisin du Sénégal, en proie à l’insécurité et sous le contrôle d’une junte militaire.

Selon nos sources qui font un suivi permanent des mouvements du trafic illicite, les derniers convois en direction de la Chine enregistrés par le réseau remontent au mois de mars 2023, en toute violation de la réglementation de la Cites. Avec les difficultés sur le chemin de Dakar, les trafiquants se sont détournés vers Nouakchott pour réussir leurs forfaits. À la question de savoir si du bois passe toujours par Dakar, notre interlocuteur rétorque : ‘’Je ne peux pas dire si du bois passe toujours à Dakar. Ce que je peux assurer, c’est qu’ils continuent de couper et de ravager nos forêts. Les dernières exportations que nous avons notées vers la Chine, c’était au mois de mars, mais c’était via la Mauritanie et non le Sénégal.’’

Jusqu’en juin 2022, une bonne partie du bois malien, à l’instar des autres produits de ce pays non côtier, passait par le port de Dakar. ‘’Plus de 7 000 containers au minimum par an pour la Générale industrie du bois. Pour 2019, l’entreprise avait exporté près de 8 000 t’’, insiste notre source, documents à l’appui.

D’après les estimations des experts contactés par le consortium, un container de bois fait environ 27 t. Il est vendu sur le marché à environ 450 000 F CFA la tonne ; 2 000 dollars en Chine (1 100 000 F CFA). Si l’on se fie donc aux chiffres de 2019, la société avait fait plus de 93 milliards de francs CFA de chiffres d’affaires. Vendu en Chine, la valeur était autour de 416 millions de dollars, soit environ 230 milliards de francs CFA. Une manne financière colossale pour les trafiquants et leurs complices au Mali, qui transitent par Dakar, pour les marchés chinois où le bois de rose est très prisé. Pour nos interlocuteurs, c’était illégal, puisque pour couper le bois, la loi malienne exigeait non seulement un plan d’aménagement des forêts où le bois est coupé, mais également un certain niveau de transformation.

À leur arrivée au pouvoir, les autorités militaires ont corsé les conditions, en prévoyant des seuils et les modalités relatives à cette transformation. Mais ce sont des dispositions qui n’ont jamais été respectées. ‘’Il n’y avait ni plan d’aménagement dans les aires où le bois est coupé, ni de transformation. Deux conditions qui ont toujours été exigées’’, dénonce notre interlocuteur.

Depuis mars 2022, les clauses ont évolué. Désormais, la Cites a pris une décision de suspension du commerce de bois de rose dans toute la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, à cause de la forte pression sur l’espèce. À partir de l’entrée en vigueur de cette nouvelle réglementation qui a eu lieu au mois de juin de la même année, il faut un avis de commerce non préjudiciable avant toute possibilité d’exportation ; c’est-à-dire qu’il faut une étude de la population pour prouver que le commerce ne nuit pas à l’espèce, renseigne le commandant Doudou Sow, Chef de la Division gestion de la faune et de la flore à la Direction des Eaux et forêts et point focal de la Cites au Sénégal.

Selon lui, à ce jour, aucun pays de l’espace ne remplit les conditions requises pour exporter du bois de rose. Sur la base de ce texte, le 10 août 2022, les autorités sénégalaises sévissent et décident de mettre en application la nouvelle législation avec, à la clef, la saisie de 124 containers de bois de rose malien. Le point focal de la Cites avait coordonné cette vaste opération qui a failli envenimer les relations diplomatiques entre les deux pays voisins. Il revient sur la prouesse : ‘’On avait saisi environ 2 480 m3, environ 124 containers qui provenaient du Mali. Je ne sais pas la valeur financière exacte, mais cela équivaut à des milliards de francs CFA. Une opération inédite du point de vue de la quantité de bois saisie.’’

Par la suite, l’État malien a dû intervenir et peser de tout son poids pour arriver à faire lever la saisie. Ils ont usé de toutes les voies et tous les subterfuges pour faire fléchir les autorités sénégalaises, nonobstant les réticences des responsables des eaux et forêts, en particulier du point focal de la Cites très à cheval sur les textes.

Interpellé sur ces pressions, Doudou Sow reconnait et explique : ‘’Vous savez, 124 containers de bois de rose venus d’un pays étranger que tu bloques à la frontière, imaginez ce que ça fait. C’était effectivement énormément de pression. Vous ne pouvez même pas imaginer à quel point ! La hiérarchie était surtout soucieuse du respect de la réglementation. Avec l’arbitrage de la Cites qui m’avait donné raison, j’étais soulagé. La notification de la Cites m’a conforté dans ma position.’’

Pour obtenir la levée de la saisie sur la marchandise, le Mali avait invoqué une exception prévue par la notification Cites. Laquelle prévoyait que le bois qui avait quitté les ports avant la notification de la suspension n’était pas concerné. Ce qui n’était pas le cas, dans le cas d’espèce. Il n’empêche, le Sénégal finit par lâcher du lest, en acceptant de restituer le bois.

Interpellé, le chef de la Division de la faune et de la flore explique : ‘’C’est au mois de novembre que la levée a été décidée et les containers restitués au Mali par la voie hiérarchique. Pour que le bois puisse continuer à circuler vers le Sénégal, il fallait une nouvelle notification de la Cites. Et il y a eu une notification dans ce sens pour leur permettre de poursuivre leur trajet pour la Chine via le port de Dakar, parce que les Maliens ont produit la preuve que le bois a été acquis légalement.’’ Cette notification est tombée au mois de juin dernier et a permis aux propriétaires de transporter le produit vers la Chine, avec le concours de grands armateurs que sont le Danois Maersk, le Suisse MSC et le Français CMA-CGM. En sus de ces grands armateurs, il y a les transporteurs maliens et sénégalais, dont Touba Transports, Fof Transport and Transit et Toguna Transport.

En fait, après la restitution, pour avoir l’autorisation d’exporter le produit via Dakar, le Mali a pu obtenir l’autorisation de la Cites en prétendant que c’est du bois qui date de 2020, donc coupé avant la mesure d’interdiction. Ce qui est archifaux. Et pour couronner le tout, le pays est en train de tout faire pour avoir l’autorisation de la Cites pour pouvoir reprendre l’exploitation sans entrave. Ce qui constitue une grosse préoccupation pour les défenseurs maliens de l’environnement.

‘’Il faut savoir que la Cites ne fait pas l’évaluation et le contrôle à la place des États qui sont souverains. La Cites se base sur les éléments d’appréciation fournis par les États pour prendre des décisions. Là, les autorités ont émis un avis de commerce non préjudiciable dans lequel elles soutiennent que l’espèce est abondante, alors que ce n’est pas vrai. Aujourd’hui, il n’y a même plus de grands individus dans les forêts maliennes. Ils sont en train de couper les jeunes individus’’, rapporte ce défenseur de l’environnement avec beaucoup de dépit.

En attendant, plus de 2 000 containers remplis de bois de rose restent stockés au niveau du port sec de Bamako, dans l’attente des conditions d’exportation en Chine.

LE BOIS DES PAYS FRONTALIERS PAS ÉPARGNÉS, La Guinée et le Sénégal se font harakiri

Les trafiquants n’épargnent pas non plus les forêts sénégalaises et guinéennes, face à la raréfaction du produit au Mali.

Si le Mali reste l’épicentre du trafic de bois de rose, les pays voisins ne sont pas épargnés, non plus. Pendant longtemps, les trafiquants étaient concentrés dans la zone de la Casamance où ils opéraient en parfaite complicité avec des Sénégalais. Pour contourner la vigilance des autorités, le bois était transporté en Gambie, pour être acheminé en Asie, en particulier en Chine.

Pour l’ancien ministre de l’Environnement Haidar El Ali, si cette voie n’est plus utilisée, c’est moins par un renforcement du contrôle que par l’épuisement des stocks. ‘’Avant, le bois traversait la frontière gambienne pour finir dans les bateaux pour aller en Chine. Aujourd’hui, dans cette partie du pays, vous n’entendez plus de trafic, non parce que les autorités l’ont éradiqué, mais parce qu’il n’y a plus de bois ; tout a été coupé. Le trafic s’est alors déplacé entre Tambacounda, Niokolo-Koba et la frontière avec le Mali’’.

Selon plusieurs sources, le Sénégal est loin d’être un simple pays de transit pour les trafiquants chinois et leurs complices. C’est également un pays d’approvisionnement. C’est aussi la conviction de l’ancien ministre Haidar. Il affirme : ‘’Du bois est effectivement coupé au Sénégal. Il traverse le pays pour entrer au Mali. C’est connu. Et de là-bas, les camions qui transportent la marchandise du port de Dakar au Mali le ramènent à Dakar pour leur exportation en Chine. C’est triste, mais c’est comme ça. Le bois est conduit au Mali à bord de charrettes. C’est comme ils le faisaient avant avec la Casamance. Puisqu’il n’y a plus de bois dans cette zone, le trafic s’est déplacé de l’autre côté, dans le triangle Tambacounda, Vélingara, Niokolo-Koba et à la frontière.’’

Le phénomène ne serait pas nouveau. Il y a quelques années, vers 2017-2018, des machines maliennes avaient été saisies dans le département de Saraya, sur des trafiquants qui coupaient du bois dans les forêts sénégalaises et les acheminaient ensuite vers le Mali. ‘’Aujourd’hui, je ne sais pas si du bois est toujours coupé au Sénégal, mais je sais que du côté de la Guinée, à Sigiri plus exactement, on continue de couper et de les acheminer au Mali pour ensuite les exporter en Chine. Au Sénégal, par le passé, c’était surtout du côté de Saraya’’, affirme notre source. Nous nous sommes déplacés dans ce département situé dans la région de Kédougou, pour nous enquérir de la réalité.

Situé à plus de 700 km de Dakar, Saraya est connu pour ses mines d’or, mais aussi pour sa richesse en matière de biodiversité, avec une nature luxuriante, des animaux sauvages dans toute leur diversité. Trouvé dans son bureau, le chef du Service départemental des Eaux et forêts, Pape Gora Niang, revient sur les caractéristiques de son territoire. ‘’Saraya se trouve dans ce qu’on appelle la Zic – zone d’intérêt cynégétique. Quatre-vingt-quinze à 99 % du département se trouvent dans cette Zic. C’est donc une zone protégée. C’est la seule zone de grande chasse au Sénégal. Une zone où l’on peut chasser les animaux sauvages, dont le lion.’’

Interpellé sur le trafic de bois, M. Niang reconnait quelques cas isolés et relativise : ‘’Effectivement, on est confronté à ce problème de coupe de bois, mais je ne saurais le qualifier en utilisant certains termes. Si l’on se fie, par exemple, aux chiffres de nos PV, pour l’année 2023 en cours, nous sommes à 87 PV. C’est pourquoi je ne saurais utiliser certains termes comme trafic. C’est possible que ça existe, mais cela ne se reflète pas dans nos constats sur le terrain.’’

Pour ce qui est du bois coupé au Sénégal et acheminé au Mali, il émet de sérieuses réserves. ‘’Nous, nous sommes sur cette route principale. Les forces de défense et de sécurité sont aussi sur cette route… Je ne sais vraiment pas d’où viennent ces informations. Depuis qu’on est là en tout cas, nous n’avons vu ni des camions maliens qui passent ni du bois sénégalais qui prend le sens inverse’’.

Dehors, les va-et-vient des camions sont très fréquents. ‘’Jusqu’à plus de 100 par jour’’, informe le maire de la commune. Mais difficile de savoir la nature des marchandises souvent encastrées dans des containers sous scellés, appartenant à de grandes multinationales comme la Danoise Maersk, la Suisse MSC et la Française CMA-CGM.

Trouvé dans son domicile à quelques encablures des eaux et forêts, le maire, Samba Ly Biagui, déplore un déficit du contrôle : ‘’Sincèrement, je ne saurais dire s’il y a un trafic de bois qui passe par la localité, mais je ne vais pas le nier. Il peut y avoir toutes sortes de trafics sur cette route, puisqu’il y a peu de contrôles. Les transporteurs sont très puissants ; ils ont été jusqu’à voir le président de la République pour demander la suppression des points de contrôle, dont celui de Saraya. Aujourd’hui, sur toute l’étendue de la région de Kédougou, le seul point de contrôle c’est Mussala, au niveau de la frontière. Il n’y a de contrôle ni à Saraya ni à Kédougou. Donc, même s’il y a des trafics, il est difficile de savoir.’’

Par rapport à ce problème de contrôle, le chef du Service des eaux et forêts tente de rassurer. Pour lui, des efforts sont faits, bien que des points de contrôle aient été éliminés en raison de la réglementation CEDEAO. ‘’Le contrôle se passe de manière inopinée, parfois de manière périodique. Parfois aussi, on peut avoir des informations et on contrôle pour voir si c’est avéré. Relativement aux moyens, on ne peut pas dire qu’on a assez de moyens. On sait que les autorités font de leur mieux pour nous permettre de faire le travail. Pour le département, nous disposons de 13 éléments’’.

TRAFIC SÉNÉGAL – MALI, Une affaire de gros bonnets

Les noms de Karim Keita, de l’actuel ministre malien de la Réconciliation, ainsi que d’Aliou Sall cités dans le trafic.

Dans ce commerce à milliards financé par les Chinois, les complices ou parrains sont identifiés jusqu’à des niveaux insoupçonnés. ‘’Ce sont des groupes très puissants qui ont la mainmise sur le pouvoir. En 2021, des journalistes avaient eu à dénoncer l’implication de l’actuel ministre de la Réconciliation dans ce trafic. Son conseiller est actuellement en prison. Selon les informations, il a reçu des pots-de-vin des trafiquants’’, rapporte notre interlocuteur, convaincu qu’il existe d’autres complicités sur toute la chaine. ‘’Ils arrivent à influencer même les plus hautes autorités, allant jusqu’à obtenir des dérogations de la part des autorités de la transition, pour arriver à couper et à exporter le bois’’.

Avant le coup d’État, la Générale Industrie du bois, qui appartient à un riche homme d’affaires, comptait parmi ses soutiens Karim Keita, fils de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keita. D’après nos sources, c’est lui-même qui s’était directement impliqué en 2018, pour obtenir la levée d’une saisie de containers de bois de rose maliens par les autorités sénégalaises. Et il avait bénéficié de l’appui de proches du président de la République Macky Sall.

‘’Un proche du président Sall avait appelé le ministre de l’Environnement qui avait appelé directement le directeur général des Eaux et forêts pour obtenir la libération de la marchandise. Finalement, elle a été libérée moyennant le paiement d’une somme de 30 millions de francs CFA’’.

COMPLICITÉ, Le silence coupable des communautés

De l’avis d’Ali Haidar, il faudrait remettre au centre des préoccupations les questions écologistes.

Pendant que les forêts continuent d’être pillées, c’est l’indifférence du côté des populations. Haidar El Ali invite les citoyens à plus de prise de conscience. ‘’La question environnementale est fondamentale, plus importante que tout ce dont on parle à longueur de journée, en termes de démocratie, de droits humains… Quand on aura la démocratie, les droits humains et qu’on n’ait pas de l’eau à boire, du poisson à pêcher, c’est là qu’on va se rendre compte que l’urgence était ailleurs. Malheureusement, dans nos pays, nos populations, nos médias semblent les reléguer au second plan, jusqu’au moment où ça devient tragique, avec notamment nos enfants qui meurent dans l’océan parce qu’il n’y a plus de poisson à pêcher’’.
Du côté malien, on accuse la faiblesse des institutions, la corruption et une législation pas suffisamment robuste. En attendant les changements idoines, les experts estiment que la Cites devrait aller plus loin dans la protection de cette espèce. ‘’Nous pensons qu’on devrait tout bonnement l’inscrire à l’annexe 1 de la Cites, pour interdire totalement le commerce de cette espèce, car elle est bel et bien menacée de disparition, contrairement à ce que veulent faire croire les autorités qui soutiennent que l’espèce est abondante. Elles le disent simplement parce qu’elles ont reçu des pots-de-vin. Et la Cites est liée par les avis donnés par les techniciens des États.

Abondant dans le même sens, Haidar El Ali appelle également de tous ses vœux à renforcer davantage les dispositions législatives pour une lutte plus efficace.
Hélas, selon lui, cela ne semble pas être la priorité des autorités actuelles. ‘’On a osé dans ce pays remplacer à la tête du ministère de l’Environnement l’un des 100 écologistes les plus éminents de la planète (lui-même) pour mettre à la place un mangeur d’oryx, un mangeur d’animaux protégés. Voilà où nous en sommes. C’est comme ça et ça ne semble déranger personne’’, constate-t-il pour s’en désoler.

Trafic de bois de rose :Péril sur les forêts maliennes

Alors qu’elles ont fait de la lutte contre la corruption un de leur cheval de bataille, les autorités militaires parrainent et encouragent le pillage des forêts du Mali où le bois de rose, communément appelé ‘’bois de Vène’’, est coupé massivement et exporté vers la Chine, en passant principalement par le port de Dakar. Ce reportage est réalisé par un consortium de journalistes sénégalais qui a vu le jour après une formation sur le journalisme d’investigation initiée par la Plateforme de protection des lanceurs d’alerte en Afrique. C’est également grâce à l’appui du Rainforest Journalism Fund et du Pulitzer Center que le travail a pu être fait.

The fund designed to finance climate « loss and damage » in vulnerable countries was adopted on Thursday 30 November 2023, on the first day of the 28th United Nations Climate Change Conference (COP28) in Dubai. The establishment of this fund is the practical expression of the main promise made at COP27 in Egypt, where the mechanism was approved in principle but not adopted. Nearly six countries have already announced their contributions to this fund, but we are still a long way from the 100 billion dollars expected by developing countries.

This is good news for African countries. The fund designed to finance climate « loss and damage » in vulnerable countries was adopted on Thursday 30 November 2023, in the early hours of the 28th United Nations Climate Conference (COP28), which is being held in Dubai in the United Arab Emirates until 12 December 2023. This historic decision, which was greeted by a standing ovation from delegates from the nearly 200 participating countries, implements one of the main resolutions of COP27 in Egypt last year, where the fund was approved in principle, but its much-debated contours had not yet been defined.
« I congratulate the parties on this historic decision. It’s a positive signal for the world and for our work. We have made history today… The speed with which we have done so is unprecedented, phenomenal and historic », declared Sultan Al Jaber, the Emirati President of COP28.
According to the text adopted, the loss and damage fund is due to start operating in 2024. It will be hosted for four years by the World Bank, although this is contrary to the wishes of developing countries. The latter had opposed this option, criticising the financial institution for being in the hands of Westerners and unsuited to their needs.
All eyes on the $100 billion mark
Once it was adopted, the Fund for Loss and Damage began to be set up as soon as possible. The United Arab Emirates immediately announced a contribution of 100 million dollars. Germany followed with the same amount. Japan pledged 10 million dollars, the United States 17.5 million and the United Kingdom 40 million pounds (around 50 million dollars). According to several European Union (EU) negotiators, France and Denmark are on the verge of announcing an initial start, « in the region of a few hundred million dollars ». In addition, the European Commission and other EU member states have pledged contributions. However, industrialised countries and companies still have until 2 December 2023 to declare their bids.
On the ground in Dubai, negotiators from developing countries are now wondering how much the Loss and Damage Fund will be endowed with. The amounts announced so far are still far from the 100 billion dollars expected by the nations with the lowest CO2 emissions.
                                                                                                                                                                                      Boris Ngounou

COP28: will the loss and damage fund reach the $100 billion mark?

The fund designed to finance climate « loss and damage » in vulnerable countries was adopted on Thursday 30 November 2023, on the first day of the 28th United Nations Climate Change Conference (COP28) in Dubai. The establishment of this fund is the practical expression of the main promise made at COP27 in Egypt, where the mechanism was approved in principle but not adopted. Nearly six countries have already announced their contributions to this fund, but we are still a long way from the 100 billion dollars expected by developing countries.

In an open letter to African heads of state and government, scientists have denounced a new scramble for oil, gas and coal on the continent, led by former colonial and neo-colonial powers. The letter, published on 27 November 2023 on the eve of the 28th United Nations Climate Change Conference (COP28), calls on African leaders to reject investment in the oil sector and focus instead on developing modern, decentralised renewable energy sources for the continent.
From Mozambique to Uganda, from Senegal to Nigeria and South Africa, via Namibia, the Republic of Congo, the Democratic Republic of Congo (DRC) and Cameroon, nearly 50 African scientists and more than 4,000 young people from 30 African countries are raising their voices. In a joint letter sent to the continent’s heads of state on 27 November 2023, they began by deploring the fact that new investments are being made in fossil fuels that are incompatible with the Paris Agreement and its 1.5°C warming limit.
These scientists and young African ecologists note that Africa has already warmed by 2°C in some regions since 1900. The letter warns that if current emissions trends continue, the continent could experience an average annual temperature increase of up to 6°C by the end of the 21st century. In the run-up to the 28th United Nations Climate Change Conference (COP), which opens on 30 November 2023 in Dubai, United Arab Emirates, they call on African governments to reject the diversion of real climate and biodiversity solutions promoted by the extractive industries, including carbon markets and biodiversity credit markets. For the latter, only the development of modern, decentralised renewable energy sources can help the continent mitigate and adapt to the effects of climate change.
« I hope that by the end of COP28, resolutions will have been passed to ensure that the United Nations Fund for Loss and Damage and national adaptation plans will be financed by the revenues of those who bear the greatest responsibility for the climate crisis and who have the greatest capacity to do so », says environmentalist Ekokinya. Ekokinya, who teaches at the University of Kisangani in the north-east of the DRC, is one of 50 climatologists, researchers in the fields of forests, oceans, renewable energies and socio-economic scientists who have signed the open letter.
                                                                                                                                                                                      Boris Ngounou

COP28: African scientists call for rejection of fossil fuels

In an open letter to African heads of state and government, scientists have denounced a new scramble for oil, gas and coal on the continent, led by former colonial and neo-colonial powers. The letter, published on 27 November 2023 on the eve of the 28th United Nations Climate Change Conference (COP28), calls on African leaders to reject investment in the oil sector and focus instead on developing modern, decentralised renewable energy sources for the continent.

Le Monde peut-il tourner le dos aux énergies fossiles ? Avec la COP28 qui commence le 30 novembre 2023, la question de l’abandon du pétrole et du gaz se posera avec encore plus d’insistance, même si les Nations les plus puissantes et les plus pollueuses ne sont pas pressées de franchir le pas.
La COP28 aurait pu être la date et le lieu d’un virage historique. Celui de la rupture des énergies fossiles pour les énergies renouvelables. Mais c’était sans compter sur l’ironie de l’histoire. En effet, la présidence de la COP28 qui se déroulera à DUBAÏ du 30 novembre au 12 décembre 2023 a été confiée à SULTAN AL JABER. SULTAN AL JABER, 49 ans est le Ministre de l’Industrie des Emirats Arabes Unis et patron de l’ABU DHABI NATIONAL OIL COMPANY ( ADNOC), la compagnie petro-gazière du Royaume. En d’autres termes, vouloir mettrè fin à l’hégémonie du pétrole avec une COP 28 dirigée par un tel individu reviendrait à confier la promotion de la chasteté à un vendeur pour préservatifs.
Mais plus qu’un canular, il faut voir à travers ce choix paradoxal un signe pertinent : la transition écologique ne se fera pas sans l’industrie petro-gazière mondiale et encore moins contre elle. Les ramifications des intérêts dans les milieux politiques, économiques et bancaires sont si puissantes qu’il serait vain de vouloir sevrer le Monde captif depuis trop longtemps de cette addiction au pétrole et au gaz sans se heurter à des dilemmes cornéliens. Certains ont essayé, ils ont eu des problèmes. Avec donc un thuriféraire de l’industrie petro-gazière à la tête de la COP 28, il y a matière à espérer que la question des énergies fossiles sera abordée de façon plus efficace et plus conciliante.
Car le temps presse. Depuis la COP21 en 2015, marquée par la signature de l’ACCORD DE PARIS, l’heure est au bilan. Les États doivent s’accorder sur un texte bilan des mesures prises jusqu’à présent, et fixer l’ambition pour les années à venir. C’est sur cette base que les pays devront proposer ensuite, d’ici à 2025, de nouvelles « contributions déterminées au niveau national », c’est-à-dire des plans d’action pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Depuis la COP26 à GLASGOW au Royaume-Uni, les déclarations d’intention sur la sortie des énergies fossiles, notamment le charbon, sont tendances. Cependant, des pays comme la Russie, la Chine ou les pays du Golfe comme l’Arabie Saoudite freinent des quatre fers pour que le Monde ne sorte guère de cet enfer avant longtemps. Le pétrole est vital pour l’économie de ces différents pays.
Des États veulent bien concéder une élimination progressive des combustibles fossiles, mais seulement ceux « unabated » c’est-à-dire qui ne seront pas dotés de système de captage ou de stockage de carbone. Ces technologies consistent à récupérer les émissions sur une installation industrielle, avant qu’elles ne soient émises dans l’atmosphère. Le CO2 est ensuite séparé du reste et compressé pour être envoyé dans des formations géologiques profondes où il est censé rester pour des millions d’années.
Quant aux pays en développement comme le CAMEROUN, il y a des raisons pour eux d’être réticents à s’engager tête baissée dans la voie du renoncement aux énergies fossiles. D’abord parce que les 100 milliards d’euros annuels promis par les pays du Nord pour financer la transition écologique des pays du Sud sont toujours attendus. Ensuite et enfin, pour un pays comme le CAMEROUN qui doit lutter pour sortir sa population du chômage et de la misère en lui offrant la prospérité économique, la sortie du pétrole et du gaz est pour le moment une question sans objet.
                                                                                                                                                                                   LEONEL AKOSSO