La République du Congo accueille à Brazzaville, du 26 au 28 octobre, le Sommet des Trois Bassins, un événement historique coïncidant avec le début de la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes. Ce sommet réunira des dirigeants des régions de l’Amazonie, du Bassin du Congo et de Bornéo-Mékong-Asie du Sud-Est, marquant une initiative sans précédent visant à créer une alliance mondiale engagée dans la revitalisation de 350 millions d’hectares d’écosystèmes terrestres et aquatiques. Cette initiative sera guidée par les principes fondamentaux de la coopération Sud-Sud.
Les nations forestières tropicales jouent un rôle central dans la lutte contre la déforestation tropicale et dans l’élaboration d’une gouvernance mondiale en matière de climat et de biodiversité. Et pour cause : les trois bassins (Amazonie, Congo, Bornéo-Mékong-Asie du Sud-Est) abritent collectivement 80 % des forêts tropicales du monde et deux tiers de la biodiversité terrestre.
« L’Amazonie, le bassin du Congo et les forêts tropicales indonésiennes ont besoin d’une véritable protection contre les menaces énormes auxquelles elles sont confrontées, telles que l’empiètement de l’agro-industrie, des infrastructures, de l’exploitation forestière, de l’exploitation minière, des compensations de carbone et de biodiversité et de l’exploration pétrolière. Face aux crises du climat et de la biodiversité et aux injustices sociales persistantes dans ces régions, l’amélioration de la protection des forêts primaires et la restauration écologique des forêts naturelles dégradées peuvent améliorer les perspectives de la biodiversité, augmenter le stockage du carbone et améliorer la résilience et la stabilité des écosystèmes forestiers », a déclaré Irène Wabiwa, responsable du projet international pour le Bassin du Congo à Greenpeace Afrique. « Cela peut également réduire le risque d’émissions et de points de basculement. Par conséquent, la résolution de la crise du climat et de la biodiversité exige des plans et des solutions intégrés, car il existe des dépendances fonctionnelles entre la biodiversité, l’intégrité des écosystèmes et l’atténuation et l’adaptation au climat », a-t-elle ajouté.
Dans ce contexte, la reconnaissance du rôle fondamental des peuples autochtones, des communautés locales et d’autres groupes détenteurs de droits dans la protection et la restauration de ces forêts est de la plus haute importance. Toute proposition de conservation de ces forêts qui n’intègre pas la reconnaissance et la protection des droits des peuples autochtones et des communautés locales d’Afrique, d’Amérique latine et d’Indonésie ne peut aboutir. Plus de 75 % des forêts sont protégées par les peuples autochtones et les communautés locales, mais leur rôle et leurs connaissances en matière de protection de la nature et de la biodiversité n’ont pas encore été suffisamment reconnus. Cela devient évident lorsque nous observons leur représentation minimale ou inexistante dans les arènes politiques, tant au niveau national qu’international.
En outre, seuls 17 % des fonds alloués au cours des dix dernières années incluent la participation des peuples autochtones ou des organisations de communautés locales. Les voix des peuples autochtones et des communautés locales doivent être entendues et amplifiées. Ils doivent également avoir accès aux ressources pour maintenir leurs actions autodéterminées en matière de protection de la biodiversité et de lutte contre le changement climatique.
Cependant, si l’on examine l’agenda du sommet des trois bassins, il est évident que les marchés du carbone joueront un rôle central dans les discussions, étant perçus comme un outil majeur pour financer la protection et la restauration de la nature. “Nous savons que la marchandisation de la nature et les violations des droits de l’homme vont proliférer si les marchés du carbone deviennent le principal mécanisme de financement de la protection et de la restauration de la nature », a déclaré Arie Rompas, chef d’équipe de la campagne sur les forêts à Greenpeace Indonésie. “Il est essentiel d’accentuer les approches non marchandes, conformément à l’Accord de Paris, pour financer la protection et la restauration de la nature, plutôt que de s’appuyer sur des marchés du carbone non réglementés. De plus, il convient de repérer et de promouvoir les initiatives de financement basées sur les droits, qui visent à soutenir les peuples autochtones et les communautés locales engagés dans la préservation et la restauration de leurs forêts et ressources naturelles », poursuit-il.
Dans la perspective de la CDB 16 et de la COP 30, il est impératif de développer une voie alternative pour aborder les questions liées aux forêts et aux terres. Cette voie devrait comprendre des demandes spécifiques adressées aux dirigeants mondiaux pour protéger et restaurer les forêts. Cela devrait inclure un financement prévisible et accessible tout en garantissant la reconnaissance des droits et du rôle des peuples autochtones et des communautés locales dans cet effort de protection et de restauration des forêts.
Pour Romulo Batista, Responsable de Campagne à Greenpeace Brésil : “Le sommet des trois bassins offre une opportunité unique de renforcer la coopération Sud-Sud et de construire une voie de gouvernance alternative. Cet objectif ne pourra être réalisé que si les dirigeants s’éloignent résolument des industries extractives et d’autres initiatives nuisibles qui accélèrent la destruction de la biodiversité et menacent les peuples autochtones et les communautés locales”.
“Nous exhortons les gouvernements des pays des trois bassins à protéger et à restaurer les forêts, en particulier en garantissant la reconnaissance des droits et du rôle des peuples autochtones et des communautés locales. Ces gouvernements devraient se concentrer sur la mise en œuvre d’approches alternatives, durables et non marchandes de financement de la biodiversité et encourager l’action collective », conclut Victorine Che Thoener, Responsable de Portefeuille Senior chez Greenpeace International et cheffe de délégation pour le compte de Greenpeace à Brazzaville.
Greenpeace International