En prélude à la 27e conférence des Nations unies sur le climat (COP27), African Center for Advocacy publie un rapport sur deux communautés camerounaises situées en première ligne de la crise climatique. Le document présente les témoignages des habitants de Kakou et d’Ouro Garga. Deux localités du nord du Cameroun, où les effets du changement climatique ont considérablement affecté les moyens de subsistance des populations.
« Avant, les pêcheurs avaient un revenu quotidien de 30 000 à 50 000 FCFA (environ 47 à 78 dollars américain) par jour, ce qui leur permettait de subvenir aux besoins essentiels de leur famille. Mais aujourd’hui, l’assèchement des cours d’eau et l’envahissement des herbes aquatiques ont rendu les poissons rares. Les pêcheurs réalisent à peine 2 dollars de revenu par jour. Les enfants, surtout les filles du village, ne sont plus scolarisées. », se lamente Al Hadji Saliou, 52 ans et président de l’association des pêcheurs de Kakou. Un village, situé dans la région du nord du Cameroun.
La perturbation des saisons fait aussi partie des conditions climatiques qui détruisent les moyens de subsistance des communautés locales de la région du nord du Cameroun. « Les pluies ne tombent pas assez pour permettre aux graines de germer et de s’épanouir. Les semences sont détruites, et nous devons en acheter de nouvelles. Et pourtant la plupart n’ont pas suffisamment de moyens pour acheter les semences deux fois en une saison. Cette année les pluies n’ont pas commencé à la saison habituelle, poussant plusieurs d’entre nous à perdre espoir en l’agriculture, notre principale activité. », explique Zalai Philipe, 37 ans, un agriculteur du village de Ouro Garga.
Le rapport publié le 5 août 2022 à Yaoundé par l’organisation African Center for Advocacy (ACA), note également l’impact sanitaire du changement climatique sur les communautés de la région du nord Cameroun. « La variation des précipitations, parfois excessives ou rares (selon les années), provoque des inondations, qui à leur tour engendrent des maladies comme le choléra, la typhoïde, le paludisme, et des maladies liées à la nutrition des enfants », indique le rapport.
Des populations impuissantes face aux causes humaines
Les impacts socio-économiques et sanitaires du climat dans les localités d’Ouro Garga et de Kakou sont provoqués par l’augmentation de la température à la surface de la terre. Un phénomène exacerbé par des pratiques industrielles non respectueuses de la nature, comme c’est le cas aussi dans cette région.
« Il existe une entreprise appelée ROCA, située près du village de Kakou. Cette société exploite la carrière et procède à des coupes abusives de bois vert pour chauffer les pierres, et ce depuis des années maintenant. Cette société contribue énormément à la destruction de l’environnement et fait l’objet d’importants litiges dans la région, mais comme cette société a des ramifications au plus haut niveau de l’État, la population ne sait pas vers qui se tourner. » indique le rapport.
Plaider la cause des communautés vulnérables devant la COP27
Intervenant à deux mois de la 27eme conférence des Nations unies sur le climat (COP27), le rapport de l’ACA sur la vulnérabilité des populations du nord du Cameroun face aux effets du changement climatique entend faire bouger les lignes. « La COP26 n’a pas su reconnaître l’urgence de la crise climatique. Alors que nous nous dirigeons vers la COP27 à Sharm El Sheikh, en Égypte. De nouveaux mécanismes doivent être mis sur pied afin de rendre le financement des pertes et dommages accessible aux communautés situées en première ligne de la crise climatique, telles que celles de Kakou et d’Ouro Garga.» déclare Younoussa Abbosouka, chargé des programmes à l’ACA.
L’organisation non gouvernementale (ONG) mène des actions de lobbying pour que les besoins et leurs connaissances des communautés vulnérables au changement climatique soient pris en compte dans les politiques de développement et les conférences mondiales. Grâce à cette démarche, l’ACA a contribué à faire inscrire les pertes et dommages à l’ordre du jour de la COP27.
Boris Ngounou