Le gouvernement camerounais a rendu public en 2020 un décret portant création du Parc de Ma Mbed Mbed, qui s’étend sur une superficie de plus de 12 000 hectares, dans le département du Mayo-Kani, en région de l’Extrême-Nord. Ce décret suscite aujourd’hui des réactions de la part des communautés locales qui sont descendues massivement dans les rues le 30 janvier 2025 pour demander son annulation. Elles redoutent à travers ce projet d’éventuels conflits hommes-faune qui pourraient survenir notamment avec les éléphants, la perte de leurs terres et déplorent le fait de n’avoir pas été suffisamment consultées dans le processus de prise de décision.
Le Pr Ngoussandou Bello Pierre, Coordonnateur National de Jag Sir, Association Nationale Culturelle Toupouri a déclaré: « La communauté Toupouri estime qu’il s’agit d’un complot contre leurs terres et leurs vies. Les éléphants ne font pas de distinction entre ethnies, religions ou professions. Leur présence est une menace pour tous, y compris le camp du BIR à moins de 12 km. Des ravisseurs sévissent régulièrement à Taibong et Guidiguis avant de se réfugier dans une aire protégée au Tchad. L’extension de cette zone avec le nouveau parc aggraverait l’insécurité. Le gouvernement doit reconnaître son erreur et retirer le décret pour apaiser les tensions. Au vu de la détermination des populations, si l’État s’entête, l’extermination des éléphants deviendra inévitable. ».
L’extrême-Nord du Cameroun est une région déjà confrontée à plusieurs défis, notamment en matière de sécurité, et figure parmi les régions les plus affectées par le changement climatique au Cameroun. L’an dernier, elle a été touchée par plusieurs vagues d’inondations. L’insécurité alimentaire y est un défi constant à relever.
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Dr. Lamfu Fabrice, Chargé de la campagne chargé de la campagne forêt chez Greenpeace Afrique a déclaré : “Ce parc a été créé pour la lutte contre le changement climatique et pour l’insertion socioprofessionnelle. Ce sont des objectifs à saluer. Toutefois, ce projet réduit considérablement les terres et ressources disponibles pour les populations locales. C’est la raison pour laquelle il faut reconnaître leur rôle essentiel dans la gestion durable de leurs terres et environnement. Lorsqu’une décision est prise sans leur consentement libre, informé et préalable, cela peut malheureusement conduire à des situations aussi délicates que celle-ci. Nous invitons le gouvernement à reconsidérer le projet. C’est une menace de trop pour les populations de l’extrême-nord.”
Cette manifestation vient se greffer à celle qui a eu lieu il y a quelques semaines dans la région du Sud, menée par les populations riveraines au projet Camvert dans la localité de Campo. Ces dernières sont descendues dans les rues pour demander la révision du cahier de charges par la Compagnie. En effet, selon les populations, ce document ne prend pas suffisamment en compte leurs droits. Il est important de noter que la situation actuelle dans l’extrême nord présente des défis similaires à ceux rencontrés par les populations de Campo, notamment pour ce qui concerne les conflits hommes-faune, l’accaparement des terres et au peu de consultation des populations en amont de la réalisation du projet.
Greenpeace Afrique