Alors que les chalutiers industriels continuent d’envahir illégalement les zones réservées, les pêcheurs artisanaux de Kribi font face à une équation financière intenable. Une sortie en mer de 72 heures coûte jusqu’à 90 000 Fcfa, pour des recettes souvent insignifiantes. Pris en étau entre des réglementations contraignantes et l’absence de contrôle sur les équipements importés, ils dénoncent l’inaction de l’État et le poids des filets en plastique bon marché venus du Nigeria. Fabrice Junior Nguelli Bollo, pêcheur à Kribi – Mboa Manga, a accepté répondre à nos questions.
Les pêcheurs Locaux sont – ils toujours menacés par les pêcheurs industriels ici au large de Kribi ?
J’ai puis vous assurer qu’il n’y a pas de recul parce que je suis sorti, je suis allé en mai lundi dernier, au large de Ndiako, de Yoyo, c’est situé entre la Sanaga et la Dibamba. J’ai trouvé huit chalutiers dans une zone de pêche réservée aux pêcheurs locaux, c’est-à-dire les villageois de Ndiako et nous. Ces bateaux sont venus nous agresser. Je n’ai pas pu pêcher ? J’étais obligé de replier vers l’autre côté.
Vous voyez la distance qu’il y a de partir d’ici jusqu’à la Sanaga, ça fait pratiquement 7 heures de navigation. Donc on brûle pratiquement près de 40 litres d’essence comme ça. Je vous assure que moi-même que j’étais à bord, ce n’est pas que c’est quelqu’un d’autre qui m’a raconté.
Combien vous coûte l’envoie d’une pirogue en mer ?
L’envoie d’une pirogue à mer nous coûte très chère aujourd’hui. Pour une sortie de 72 heures, par exemple, on embarque le jeudi et on débarque le samedi, il faut avoir un minimum 80 000 Fcfa. Parce que là il y a le carburant qui prend près de 60 000 avec son lubrifiant, il y a la glace que nous prenons de 15 000, il y a la ration alimentaire des pêcheurs qui coûte 15 000. Donc un total minimal de 90 000 Fcfa. Maintenant, imaginez qu’on injecte 90 000 pour aller ramener une vente de 100 000. C’est insignifiant non ?
Nous constatons par ailleurs que vous continuez à utiliser des filets dont le maillage et la matière sont interdits. Une pratique qui relève de la pêche INN.
Ce qui bloque jusqu’ici, ce n’est pas nous le problème. Le problème, c’est d’abord l’État.
On ne peut pas prendre les filets qu’ils veulent, c’est-à-dire les filets aux maillages de 4 pouces et fabriqué à partir du coton. Or, à partir du moment où les filets interdits seront toujours sur le marché, des filets qui nous proviennent du Nigéria, nous les achèteront, car non seulement ils mois chères, ils nous permettent d’attraper beaucoup plus de poissons que les filets réglementaires.
Les filets de 4 pouces demandé par l’État sont destinés aux poissons moyens, c’est-à-dire qu’ils laisser passer les petits poissons. Non, on ne peut pas. On ne peut pas aller en mer, pour rentrer avec deux poissons. Nous ne pouvons pas mettre 90 000 pour aller ramener 10.000, parce qu’on a pris les maillages de 4 pouces. Si l’État ne veut pas qu’on achète les filets de petites mailles, il doit les intercepter dès leur source, avant qu’ils n’arrivent sur le marché.
Et pour ce qui est de la matière, pourquoi utilisez-vous toujours les filets en plastique ?
Le filet en coton coûte environs trois fois le prix d’un filet en plastique. On ne peut pas. Ça, c’est nous envoyer vraiment la dérive.
Nous ne pouvons pas. C’est là où se trouve le problème. C’est pourquoi nous sommes obligés de nous débrouiller avec le matériel venu du Nigeria.
Déjà, même que les Nigérians nous vendent leur filet plastique à 28 000 Fcfa. Par contre, l’État à travers le ministère des pêches et des industries animales (Minepia) nous vend ce filet nylon à 35 000 Fcfa. Du coup nous obligés de faire avec les moyens de bord.
Alors que les chalutiers industriels continuent d’envahir illégalement les zones réservées, les pêcheurs artisanaux de Kribi font face à une équation financière intenable. Une sortie en mer de 72 heures coûte jusqu’à 90 000 Fcfa, pour des recettes souvent insignifiantes. Pris en étau entre des réglementations contraignantes et l’absence de contrôle sur les équipements importés, ils dénoncent l’inaction de l’État et le poids des filets en plastique bon marché venus du Nigeria. Fabrice Junior Nguelli Bollo, pêcheur à Kribi – Mboa Manga, a accepté répondre à nos questions.
Depuis quatre ans, le Street Whole Festival allie culture urbaine, sport et conservation de la biodiversité marine. Pour cette édition 2024 tenue du 4 au 8 décembre 2024 à Kribi (au sud du Cameroun), organisateurs, chercheurs, pêcheurs et décideurs ont convergé leurs efforts autour d’une formule pluridisciplinaire, jugée efficace malgré ses coûts élevés. L’équipe d’environnementales fait le point de la 4ème édition, avec le Dr Aristide Kamla, président d’African marine mammal conservation organisation (Ammco), l’ONG organisatrice du Street Whole.
Quel bilan pour le Street Whole 2024 ?
Nous sommes effectivement au terme du Street Whole 2024. Comme les années précédentes, c’est une grosse satisfaction. Nous enregistrons une participation massive, tant au niveau local, national qu’international. Et des thématiques sur le marin côtier, pluridisciplinaires qui ont été abordées.
C’est aussi une inclusion à tout niveau de la société, les pêcheurs, les communautés locales, les chercheurs, le secteur privé, les organisations de la société civile et surtout le gouvernement qui se sont rassemblés, qui se sont mis ensemble et ont discuté, des aspects scientifiques relatifs à la protection des écosystèmes marins côtiers. Mais comme c’est le Street whole, on ne parle pas que de science, on parle aussi de la culture, on parle aussi de l’art, on parle du sport et tout ceci dans l’optique de pouvoir fédérer les esprits autour de l’idée de protéger les écosystèmes marins côtiers au Cameroun.
Depuis maintenant 4 ans, le Street Whole associe culture urbaine et conservation de la biodiversité marine. Quelle efficacité pour cette formule ?
Nous pensons que c’est une formule qui marche, quoi qu’elle soit un peu plus coûteuse, mais on pense que c’est une formule qui épouse le mieux la réalité de l’être humain, parce que l’être humain n’est pas que science, il est aussi culture, il est aussi sport.
Et lorsqu’on met ces dimensions-là ensemble, ça permet à l’être humain de se retrouver dans son écosystème le plus favorable. Alors c’est pourquoi, chaque année, nous essayons de réunir toutes ces dimensions-là pour promouvoir la conservation des écosystèmes marins côtiers, promouvoir les espèces de la faune marine qu’on dispose dans notre pays, notamment les baleines, les requins, les dauphins et les tortues marines.
Cette 4ème édition a été parrainée par le ministère des forêts et de la faune, et pourtant le Street Whole concerne les ressources halieutiques. Pourquoi ce choix ?
Alors, avant toute chose, les espèces que nous avons mentionné tout à l’heure, dont les requins, les baleines, les dauphins, font partie de la faune, mais une faune particulière, elle est aquatique, mais elle reste quand même la faune, et il va de soi que ce soit le ministère des Forêts et de la Faune qui soit ici l’institution gouvernementale en charge de cette question-là.
C’est pourquoi nous avons sollicité le parrainage de ce ministère, qui a bien voulu nous accompagner ici. Je profite d’ailleurs pour remercier le ministre Jules Doret Ndongo pour le fait qu’il a prêté une attention particulière à cet événement et a accordé le partenariat de son département ministériel pour cet événement. Quoique le ministre lui-même n’ait pas pu se rendre ici à cause de son agenda chargé, il a dépêché des émissaires qui ont participé à cet événement de bout en bout et qui vont lui rendre compte.
Propos recueillis par Boris Ngounou et André Naoussi
Depuis quatre ans, le Street Whole Festival allie culture urbaine, sport et conservation de la biodiversité marine. Pour cette édition 2024 tenue du 4 au 8 décembre 2024 à Kribi (au sud du Cameroun), organisateurs, chercheurs, pêcheurs et décideurs ont convergé leurs efforts autour d’une formule pluridisciplinaire, jugée efficace malgré ses coûts élevés. L’équipe d’environnementales fait le point de la 4ème édition, avec le Dr Aristide Kamla, président d’African marine mammal conservation organisation (Ammco), l’ONG organisatrice du Street Whole.
Adoptée par l’Assemblée nationale le 2 décembre 2024 et trois jours plus tard par le Sénat, la nouvelle loi sur la pêche promet de révolutionner le secteur au Cameroun. Lors de la 4e édition du Street Whole à Kribi du 4 au 8 décembre 2024, cette évolution législative a fait débat. Les représentants du ministère des Pêches et des Industries animales (Minepia) saluent une avancée significative du cadre normatif, mais la société civile joue la carte de la prudence. Une fois la promulgation de la loi ainsi que la signature de son décret d’application, obtenues, sa mise en œuvre pourrait être une nouvelle paire de manche.
La nouvelle loi sur la pêche adoptée par les deux chambres du parlement camerounais marque un tournant pour un secteur longtemps fragilisé par la pêche illicite, non déclarée et non règlementée (pêche INN). Le texte de 41 pages prévoit la mise en place d’un système de surveillance maritime utilisant des technologies avancées pour détecter et prévenir les activités de pêche illicite dans les eaux nationales. Le projet encourage la coopération avec des organismes internationaux et les communautés locales pour partager des informations, développer des initiatives de sensibilisation, et renforcer les capacités de gestion durable des ressources halieutiques.
Selon Marie Thérèse Omgba, sous-directrice de la pêche industrielle et artisanale au Minepia, cette loi offre des solutions inédites : « Il y a tout un chapitre dédié au suivi contre la surveillance pour encadrer les activités de pêche. Les sanctions pénales, désormais plus dissuasives, vont renforcer la gestion et la régulation du secteur. » Une innovation majeure est l’intégration des dispositions de l’accord sur les mesures relevant de l’État du port, un pas important vers la transparence et la durabilité.
Cependant, la mise en œuvre demeure un défi crucial. Younoussa Abbosouka, représentant de l’Environmental Justice Fondation (EJF) au Cameroun, précise : « Même si la loi pose des bases juridiques solides, c’est son application effective sur le terrain qui déterminera son succès. Par ailleurs le futur décret d’application, incluant les mesures de transparence nécessaire, sera également crucial pour assurer une bonne gouvernance des activités de pêche au Cameroun… ». Son intervention souligne l’importance d’un engagement politique ferme pour transformer ces ambitions législatives en actions concrètes.
Par ailleurs, cette législation répond à une urgence économique et environnementale. La pêche INN coûte chaque année au Cameroun environ 10 milliards de FCFA en manque à gagner, selon les estimations de la FAO. Ce fléau a valu au pays un carton rouge de l’Union européenne en 2021, freinant l’exportation vers les marchés européens. Avec cette loi, le Cameroun ambitionne de restaurer sa crédibilité et de sécuriser les moyens de subsistance des communautés côtières.
Adoptée par l’Assemblée nationale le 2 décembre 2024 et trois jours plus tard par le Sénat, la nouvelle loi sur la pêche promet de révolutionner le secteur au Cameroun. Lors de la 4e édition du Street Whole à Kribi du 4 au 8 décembre 2024, cette évolution législative a fait débat. Les représentants du ministère des Pêches et des Industries animales (Minepia) saluent une avancée significative du cadre normatif, mais la société civile joue la carte de la prudence. Une fois la promulgation de la loi ainsi que la signature de son décret d’application, obtenues, sa mise en œuvre pourrait être une nouvelle paire de manche.
En 2024, comme en 2022, des précipitations extrêmes ont frappé plusieurs pays d’Afrique, notamment le Soudan, le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad, causant des inondations catastrophiques. Ces épisodes ont tué plus de 2 000 personnes et déplacé des millions d’autres. Selon la World Weather Attribution, une organisation internationale qui analyse les phénomènes météorologiques extrêmes, ces inondations, de plus en plus fréquentes, sont directement liées au changement climatique causé par l’homme. Au Cameroun, ces inondations mettent en lumière des failles dans la planification urbaine et la gestion de l’eau, aggravant la vulnérabilité des populations. Pour en parler, le Dr Lionel Djibie Kaptchouang, géographe et expert en mobilité durable et climat, analyse les causes et solutions face à ces catastrophes croissantes.
Les inondations s’aggravent-elles au Cameroun ?
Dr Lionel Djibie Kaptchouang : Oui, elles s’aggravent indéniablement. Les précipitations extrêmes deviennent de plus en plus fréquentes en raison des changements climatiques. En 2024, comme en 2022, des pluies historiques ont été enregistrées dans la région sahélienne, y compris au Cameroun. Elles ont provoqué des inondations sans précédent, notamment dans l’Extrême-Nord. Ce phénomène s’explique par l’augmentation continue des températures, favorisée par les activités humaines, qui entraîne des précipitations intenses sur de courtes périodes.
Un rapport de la Banque mondiale de 2017 prévoit une hausse des températures au Cameroun, allant de 1,4 °C à 1,8 °C d’ici 2050. Ces changements augmentent les risques d’inondations dévastatrices.
Quels sont les facteurs qui exacerbent les effets des inondations sur les communautés ?
Il y a deux catégories de facteurs : environnementaux et humains.
Sur le plan environnemental :
Les changements climatiques augmentent la fréquence des pluies intenses.
Le relief joue un rôle aggravant : les villes situées dans des plaines et vallées, comme Maroua, sont particulièrement vulnérables. Les plaines à faible pente ralentissent l’écoulement des eaux, favorisant leur accumulation, tandis que les vallées, zones de convergence des eaux, subissent des débordements des cours d’eau.
La nature des sols, notamment argileux et imperméables, aggrave la situation en empêchant l’infiltration de l’eau, ce qui favorise des accumulations rapides.
Sur le plan humain :
Une planification urbaine inadéquate. Les plans directeurs de nombreuses villes camerounaises, y compris Yaoundé et Maroua, ne sont pas alignés sur les objectifs de développement durable (ODD) ou le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes.
L’absence de systèmes d’assainissement performants. Les villes ne disposent pas de réseaux d’égouts adaptés. Les caniveaux existants sont souvent obstrués ou en mauvais état, limitant leur capacité à drainer efficacement les eaux pluviales.
Que peuvent faire les populations face à ces inondations répétées ?
Les populations doivent adopter un esprit de solidarité et de fraternité pour surmonter ces épreuves ensemble. Mais il est aussi crucial d’investir dans la sensibilisation. Les habitants des zones à risque doivent être formés aux bonnes pratiques, comme le nettoyage des caniveaux et l’évacuation rapide des zones inondables.
Que doit faire le gouvernement ?
Le gouvernement doit impérativement élaborer une politique nationale de lutte contre les inondations, avec un plan de riposte détaillé et adapté aux spécificités régionales.
Il faut également :
Mettre à jour les plans directeurs urbains pour les aligner sur les standards internationaux.
Concevoir des systèmes d’alerte précoce pour informer les populations à risque avec précision.
Investir dans des infrastructures d’assainissement modernes, comme des égouts adaptés aux pluies torrentielles.
En intégrant ces mesures dans une stratégie holistique, le Cameroun pourrait réduire significativement les impacts des inondations sur les communautés.
Les inondations deviennent de plus en plus fréquentes et dévastatrices au Cameroun, notamment dans les régions de l’Extrême-Nord. Dr Lionel Djibie Kaptchouang, géographe et expert en mobilité durable et climat, analyse les causes de ce phénomène, ses impacts sur les communautés et les solutions envisageables.
Château-Thierry accueillera les 23 et 24 novembre 2024 la seconde édition de l’Urban Thinkers Campus, une conférence internationale dédiée aux solutions écologiques et durables pour les villes de demain. Rendez-vous pour échanger, s’inspirer et créer un avenir plus vert et inclusif.
Pour sa deuxième édition, l’Urban Thinkers Campus s’installe à Château-Thierry, transformant la ville en un centre de réflexion et d’innovation. L’événement, organisé les 23 et 24 novembre 2024, promet des discussions profondes sur la construction d’éco-villes durables et met l’accent sur des solutions concrètes pour les défis environnementaux urbains.
La première journée, le 23 novembre, réunira des experts et des passionnés de la ville durable à la Maison de l’Amitié France-Amérique. De 10h à 17h, ils aborderont des sujets cruciaux tels que l’accès équitable à l’eau, l’agriculture écologique, les énergies renouvelables et les constructions durables. Des ateliers interactifs sont également prévus pour approfondir les thèmes et permettre aux participants de dialoguer avec des spécialistes et potentiels financeurs.
Le 24 novembre, sur inscription, une journée de découverte écoresponsable sera organisée dans le Sud de l’Aisne. Les participants auront l’opportunité unique de visiter des maisons écologiques, des vignobles de champagne engagés dans la durabilité et des exploitations agricoles adoptant des pratiques écologiques exemplaires. Cette immersion permettra de voir concrètement comment allier respect des traditions et pratiques modernes au service de l’écologie.
Modalités de participation
Pour assister à cet événement, l’inscription est obligatoire. La participation aux conférences du premier jour est libre, tandis que celle du 24 novembre, réservée aux inscrits, peut se faire par e-mail à : contact@fondation-eboko.org.
L’Urban Thinkers Campus est une opportunité unique de contribuer à la transformation durable des villes, de rencontrer des acteurs de la ville résiliente et de s’engager pour un avenir plus respectueux de notre environnement.
Château-Thierry accueillera les 23 et 24 novembre 2024 la seconde édition de l’Urban Thinkers Campus, une conférence internationale dédiée aux solutions écologiques et durables pour les villes de demain. Rendez-vous pour échanger, s’inspirer et créer un avenir plus vert et inclusif.