Le 13 février 2025, le procès sur les questions préliminaires relatives au droit nigérian dans l’affaire Shell contre les communautés Ogale et Bille, du territoire d’Ogoni au Nigéria, s’est ouvert devant la Haute Cour du Royaume-Uni. Le géant pétrolier est accusé d’exploitation peu respectueuse de pétrole dans la région du Delta du Niger pendant plus de 10 ans, avec pour conséquences la pollution des ressources en eau et la destruction des moyens de subsistance des communautés d’Ogoni.
Le procès qui ira jusqu’au 10 mars 2025 à la Haute Cour du Royaume-Uni, fait suite à une longue bataille judiciaire marquée par des tentatives de Shell pour retarder la procédure, refusant de reconnaître sa responsabilité légale. Une bataille stoppée nette le 12 février 2021 par une décision historique de Londres, contraignant le groupe pétrolier à répondre des atteintes aux droits humains qu’elle commet au Nigeria. Et le 6 décembre 2024, le tribunal britannique donnait son feu vert à la poursuite de l’affaire.
«Il y a 10 ans, les habitantes des communautés Ogale et Bille, ont affirmé que leurs moyens de subsistance avaient été détruits et leurs maisons endommagées par des centaines de déversements pétroliers provoqués par Shell dans le Delta du Niger. La pollution a causé des dégâts immenses sur l’environnement local, tuant les poissons et les végétaux, et privant des milliers de personnes d’un accès à l’eau potable», indique Amnesty internationale qui a publié de nombreux rapports faisant état de l’impact négatif des activités du groupe. L’ONG internationale qui soutient les plaignants, ajoute que «la contamination de l’eau et d’autres conséquences affectent même les bébés qui, dans certains cas, naissent avec des malformations».
Selon l’Organisation des Nations unies (ONU), au moins 7 000 incidents de déversement de pétrole ont eu lieu depuis 1958 dans la région. En 2011, une étude du Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnud) soulignait aussi, dans l’ouest du pays Ogoni, la présence de benzène dans l’eau contaminée, un cancérigène quantifié à un niveau près de 900 fois supérieurs aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les plaignants espèrent donc obtenir une reconnaissance de la pollution présumée du géant pétrolier dans la région du Delta du Niger, et notamment dans le territoire d’Ogoni et des réparations.
Les avocats de Shell devraient quant à eux détailler leurs arguments préliminaires ce vendredi 14 février, après avoir entendu ceux de l’accusation, qui représente environ 13 000 habitants du delta du Niger. Le fond des débats commencera le lundi 17 février 2025. L’objectif pour Shell, c’est de convaincre la juge que l’entreprise anglo-néerlandaise ne peut pas être jugée pour des dégâts environnementaux commis, certes avec son pétrole, mais par des personnes tierces : des criminels locaux qui auraient siphonné les pipelines et se seraient adonnés à du raffinage illégal. Dans des documents soumis en amont du procès, la compagnie reconnaîtrait son obligation d’indemniser les communautés touchées par des déversements pétroliers, même accidentels, mais pas dans les cas d’une intervention tierce.
Inès Magoum