L’avenir de la planète est-il suffisamment abordé par les candidats en lice pour l’élection présidentielle 2025 au Cameroun ? Environnementales.Com se penche sur cette question, à cinq jours du scrutin du 12 octobre prochain.
Dans moins d’une semaine, les Camerounais se rendront aux urnes pour élire celui qui les dirigera pour les sept prochaines années. Si les candidats sont officiellement douze sur la liste d’Elections Cameroon (Elecam), chargé d’organiser le scrutin, dix s’affronteront réellement, dont le président sortant Paul Biya, qui brigue un huitième mandat à l’âge de 92 ans, au pouvoir depuis 1982. Les deux autres candidats s’étant ralliés derrière une autre candidature.
Si les candidats ont développé une panoplie de thèmes dans leurs programmes de campagnes respectifs, ce sont ceux concernant l’avenir de la planète qui ont davantage retenu notre attention. Le président Paul Biya prévoit, s’il est réélu, de prendre des mesures appropriées en vue de faire de l’écologie une grande cause nationale entraînant l’adoption de nouveaux comportements conformes aux exigences de la préservation de l’environnement. « Je ferai voter une grande loi sur l’économie durable intégrant la préservation de la biodiversité, des forêts, de la faune, de l’eau et des sols, afin de faire du Cameroun un leader dans la lutte contre les changements climatiques dans le bassin du Congo. Je veillerai au renforcement des mesures relevant de l’économie circulaire, en vue de répondre plus précisément au défi de la gestion des déchets», peut-on lire sur le site internet reservé à sa campagne.
Il s’agit bien sûr ici de la continuité de ce que l’homme politique a entamé il y’a déjà plusieurs années, en vue de la préservation de l’environnement, notamment le reboisement dans le cadre de la lutte contre la désertification, l’élaboration d’un mécanisme pour le développement propre, la gestion durable des forêts, conservation de la biodiversité. Par ailleurs, la tête de liste du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), pense pouvoir permettre au Cameroun de respecter son engagement de réduction de 32 % de l’empreinte carbone de son développement par rapport à 2010, à l’horizon 2035.
Un autre candidat qui fait de l’écologie l’une de ses priorités est Cabral Libii. À 45 ans, cet ancien journaliste porte les couleurs du Parti camerounais pour la réconciliation (PCRN).
Environnement, transition écologique, aménagement des territoires
S’il est élu président de la République du Cameroun, Cabral Libii ambitionne de mettre en place une politique environnementale fondée sur la justice climatique et la résilience, d’oeuvrer en faveur d’une gestion durable des ressources naturelles et de renforcer la lutte contre la déforestation, un problème croissant, avec une perte de 2,05 millions d’hectares de couverture forestière entre 2021 et 2023, due à l’expansion agricole (notamment pour le cacao), à l’exploitation minière illégale, à l’exploitation forestière non durable et à la pression démographique.
Sur le plan énergétique, il accélérera la transition énergétique à travers le développement des énergies renouvelables (solaire, éolienne, hydrigène, biomasse, eau, etc.). Les territoires seront quant à eux aménagés pour être plus équilibrés. Ce qui limitera l’exode rural et les déséquilibres régionaux. Enfin, Cabral Libii prévoit de travailler à la construction de villes durables, inclusives et résilientes aux défis climatiques au Cameroun.
La décentralisation de la gestion de l’eau
La transition énergétique fait également partie des priorités de Samuel Iyodi Hiram, 38 ans, investi par le Front des démocrates camerounais (FDC), et de Serge Espoir Matomba, 46 ans, qui participe aux présidentielles 2025 sous les couleurs du Peuple uni pour la rénovation sociale (PURS).
Si l’action de Samuel Iyodi Hiram sera limitée à l’amélioration de l’alimentation en électricité à partir des sources renouvelables, notamment dans chaque commune du pays d’Afrique centrale, Serge Espoir Matomba développera, en plus de petites centrales pour la consommation domestique et la petite activité industrielle au niveau local, de grandes centrales hydroélectriques qui seront réservées à la production industrielle.
Le candidat du PURS a aussi pensé à l’approvisionnement en eau potable. Ainsi, il envisage, pendant son mandat s’il est plébiscité par le peuple, de lancer des projets de construction de nouvelles stations d’eau potable et des projets de réhabilitation et de modernisation des installations hydrauliques en vue de sécuriser la desserte en eau potable des Camerounais. Pour atteindre cet objectif, la gestion de l’eau sera décentralisée et désormais placée sous la responsabilité des communues. Et les ressources en eau, surveillées et protegées.
La transformation de l’agriculture
Joshua Osih, le président du Social Democratic Front (SDF), prétend également pouvoir sortir les Camerounais de la crise énergétique et hydrique actuelle. Par ailleurs, il annonce un soutien massif à l’agriculture. Il vise entre autres la modernisation de l’agriculture, où l’utilisation de semences améliorées est de 3 %, afin d’augmenter les rendements, de rendre le travail des agriculteurs moins pénible qu’il ne l’est aujourd’hui et d’augmenter leurs revenus en : «Mettant en œuvre une loi-cadre sur l’agriculture, une réforme agraire et en simplifiant les procédures d’obtention d’un titre foncier afin de permettre à ceux qui travaillent la terre, y compris les femmes, d’ accéder à des titres de propriété pouvant servir d’actifs sociaux pour obtenir des financements auprès des banques, et en mettant en place un registre national des agriculteurs et des éleveurs ainsi qu’un observatoire agricole (…) », indique le candidat du SDF dans son programme d’actions.
Issa Tchiroma Bakary, 79 ans, à la tête du parti Front pour le salut national du Cameroun (FSNC) se concentrera également sur l’agriculture, notamment à travers le lancement d’un plan agricole national pour moderniser, soutenir et sécuriser l’agriculture familiale, l’amélioration de l’accès facilité à l’eau, irrigation, crédit et équipement rural et la priorisation de la souveraineté alimentaire et à la réconciliation ville-campagne.
Intégrer les femmes et les jeunes dans la lutte climatique
Quand on parle d’éologie, Patricia Hermine Tomaïno Ndam Njoya, à la tête de l’Union démocratique du Cameroun (UDC), et seule femme en lice pour les présidentielles, pensent directement à la place accordée à elles aujourd’hui, dans les actions en faveur de la préservation de l’environnement. Elles, qui sont les premières impactées négativement par les effets du changement climatique. Après elles, viennent les jeunes, qui doivent être davantage sensibilisés sur l’importance de la nature afin qu’ils contribuent mieux à sa protection.
Aussi, dans son programme d’actions pour les prochaines échéances électorales, les femmes devront être davantage intégrées dans la mise en place de programmes environnementaux, leurs capacités devront quant à elles être renforcées, en matière fabrication de bois de chauffe, de gestion de l’eau ou de gestion des catastrophes naturelles (inondations, cyclones, glissements de terrains, sécheresse, etc.). Et les jeunes devront être sensibilisés à adopter des gestes responsables pour le bien être collectif.
On le constaté bien, l’écologie a effectivement sa place dans les présidentielles 2025 au Cameroun, même si les propositions ne sont pas toujours musclées. Toutefois, on s’est étonné en consultation les différents programmes, que l’enjeu du siècle ne figure pas dans la feuille de route d’autres candidats. Jusqu’ici leurs campagnes regardent ailleurs.
Pour savoir lequel des programmes environnementaux sera concrétisé, il faudra attendre que les urnes parlent, après le décompte des suffrages et proclammation des résultats des élections du 12 octobre 2025.
Inès Magoum