Le Gabon renforce son engagement pour une gouvernance durable de ses ressources marines. Le 25 juin 2025, le gouvernement gabonais a signé un protocole d’accord stratégique avec Global Fishing Watch (GFW), une organisation internationale œuvrant pour la transparence des activités humaines en mer. Ce nouveau pacte vise à intensifier la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), un fléau qui menace les écosystèmes et l’économie des États côtiers du Golfe de Guinée.
Ce protocole d’accord vient formaliser une collaboration entamée dès 2020 entre le Gabon et GFW. Il marque une nouvelle étape en élargissant la portée des actions à l’ensemble du secteur halieutique national, notamment grâce à des outils technologiques de pointe : données satellitaires, analyses automatisées, et systèmes de suivi des navires.
L’objectif central est de doter les autorités gabonaises d’instruments de suivi, de contrôle et de surveillance (SCS) plus performants, capables de détecter en temps réel les activités suspectes dans la Zone Économique Exclusive (ZEE) gabonaise, régulièrement ciblée par des navires étrangers non autorisés.
Selon Laurence Mengue-Me-Nzoghe Ndong, ministre de la Mer, des Pêches et de l’Économie bleue, cet accord s’inscrit dans « la vision du président Brice Clotaire Oligui Nguema, qui place la transparence, le contrôle et le respect des normes internationales au cœur de la gouvernance maritime du Gabon ».
Une initiative régionale saluée
Le Gabon confirme ainsi son leadership régional. En juin 2024, le pays s’est déjà illustré en rejoignant officiellement le partenariat entre Global Fishing Watch et la Commission régionale des pêches du golfe de Guinée (COREP), une coalition de 11 pays. L’enjeu : mieux protéger les 5 700 kilomètres de côtes riches en biodiversité, qui assurent l’alimentation, l’emploi et les revenus de millions de personnes en Afrique de l’Ouest et centrale.
Jusqu’ici concentrée sur la pêche industrielle, la surveillance s’élargit désormais à la flotte artisanale, estimée à 1 000 pirogues. Déjà, plus de 300 embarcations ont été équipées du système de géolocalisation CLS NEMO. Le nouveau partenariat permettra non seulement d’étendre cette couverture, mais aussi de traiter et exploiter efficacement les données collectées, afin d’élaborer des politiques mieux informées et plus adaptées aux réalités du terrain.
Cette approche inclusive ambitionne aussi de renforcer la sécurité des pêcheurs, de limiter les conflits d’usage en mer et de garantir la traçabilité des produits halieutiques, une exigence croissante sur les marchés internationaux.
Des outils numériques pour des océans protégés
Le protocole prévoit le recours au système d’identification automatique (AIS) pour tous les navires opérant dans les eaux gabonaises. Ce dispositif, déjà utilisé dans les grandes pêcheries mondiales, permettra une surveillance continue des mouvements en mer. En parallèle, GFW mettra à disposition des autorités nationales :
- Des analyses de données sur les comportements de pêche.
- Des formations techniques pour renforcer les capacités nationales.
- Des outils d’évaluation des aires marines protégées (AMP).
- Un appui à l’application de l’Accord sur les mesures du ressort de l’État du port (PSMA), un traité clé de l’ONU contre la pêche INN.
L’analyse des données de géolocalisation facilitera aussi la planification spatiale maritime et la protection des écosystèmes sensibles, deux leviers essentiels pour bâtir une économie bleue résiliente.
Une coopération élargie avec la Cellule d’Analyse Conjointe
Lors de la signature de l’accord, la ministre gabonaise a également officialisé un partenariat avec TMT (Trygg Mat Tracking), une organisation associée à GFW et au Réseau international de suivi, de contrôle et de surveillance (IMCSN). Ensemble, ces trois entités ont mis sur pied la Joint Analytical Cell (JAC), ou Cellule d’Analyse Conjointe, dédiée au renseignement halieutique et au soutien opérationnel des pays engagés contre la pêche illégale.
La JAC offrira au Gabon :
- Un appui analytique ciblé pour interpréter les données maritimes.
- Des conseils techniques pour l’amélioration des cadres réglementaires.
- Un accompagnement stratégique pour renforcer la coopération sous-régionale en matière de surveillance maritime.
Données et gouvernance : un modèle africain en devenir
Le Gabon, à travers ce nouvel accord, confirme son ambition de devenir un modèle africain de gouvernance maritime fondée sur les données. Pour Dame Mboup, responsable Afrique de GFW, « ce partenariat permet une gestion plus intelligente et plus efficace des ressources marines du Gabon, au bénéfice des communautés locales et de l’écosystème ouest-africain dans son ensemble. En plaçant la transparence au cœur des politiques publiques, le Gabon établit une norme à suivre ».
Boris Ngounou